L’Union européenne a adopté, mardi 16 juillet, un texte prévoyant d’exclure à partir de 2014 les territoires occupés de sa coopération avec Israël, provoquant la colère de Tel-Aviv, qui y voit un "diktat" sur ses frontières.
La directive, qui sera publiée vendredi au journal officiel de l’Union, dispose que "tous les accords entre l’Etat d’Israël et l’UE doivent indiquer sans ambiguïté et explicitement qu’ils ne s’appliquent pas aux territoires occupés par Israël en 1967". Elle concernera notamment tous les prêts et instruments financiers financés par l’Union européenne.
L’UE a minimisé la portée de ces "lignes directrices", en parlant de "clarifications" ne concernant qu’"un très faible nombre de cas". Elles établissent pourtant pour la première fois "une distinction entre Israël et les entités en Cisjordanie, à Jérusalem-Est, la bande de Gaza et le plateau du Golan", comme l’a indiqué David Kriss, un porte-parole de la délégation de l’UE en Israël.
Nétanyahou n’acceptera pas de "diktats de l’extérieur"
Selon de hauts responsables israéliens cités par le quotidien Haaretz, Israël se retrouvera face à un dilemme : soit signer une clause faisant référence aux lignes de 1967, qu’il récuse, soit renoncer à d’important projets de coopération avec son principal partenaire commercial. "A partir de maintenant, si le gouvernement israélien veut signer des accords avec l’Union européenne ou l’un de ses Etats membres, il devra reconnaître par écrit que les colonies de Cisjordanie ne font pas partie d’Israël", a expliqué un de ces responsables sous le couvert de l’anonymat.
Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a vivement réagi à ce texte, en assurant que son gouvernement n’accepterait pas de "diktats de l’extérieur sur nos frontières" lors d’une réunion ministérielle d’urgence. "Cette question ne sera tranchée que dans le cadre de négociations directes entre les parties", a-t-il ajouté.
Un peu plus tôt dans la journée, la plupart des responsables israéliens avaient pourtant tenté de minimiser l’importance de cette décision. Le ministre de la défense, Moshé Yaalon, a affirmé qu’elle n’aurait guère d’effet concret, rappelant que la communauté internationale considérait déjà la Cisjordanie comme un territoire occupé : "Nous continuerons à agir en fonction de notre politique et de nos intérêts".
"Une étape très importante" vers la fin de la colonisation
Son collègue aux relations internationales, Youval Steinitz, a appelé de son côté à ne "pas exagérer les retombées de cette directive administrative énervante" s’appliquant seulement "aux futurs accords et pas à ceux déjà signés". "Une majorité de ministres européens des finances et des affaires étrangères s’opposent à des sanctions ou un boycottage d’Israël", avait-il assuré.
Le gouvernement palestinien a salué pour sa part l’initiative européenne comme "une étape très importante pour arrêter la construction de colonies et mettre fin à l’occupation". Hasard du calendrier, cette initiative coïncide avec la sixième visite du secrétaire d’Etat américain, John Kerry, dans la région pour tenter de relancer les pourparlers de paix israélo-palestiniens. Le président palestinien, Mahmoud Abbas, réclame pour revenir à la table des négociations un gel total de la colonisation et une référence aux lignes d’avant l’occupation israélienne en juin 1967 comme base de discussion.
Yariv Oppenheimer, responsable du mouvement anticolonisation La Paix maintenant, s’est lui aussi félicité de la démarche européenne : "Les Européens, comme beaucoup d’Israéliens, estiment qu’il n’est plus possible de fermer les yeux sur la poursuite de la colonisation. Le monde a compris le bluff du gouvernement Nétanyahou". Un représentant des colons, Dani Dayan, a au contraire reproché à l’UE de "s’aligner sur les exigences les plus extrémistes des Palestiniens", estimant qu’elle abandonnait de facto "toute participation dans le processus de paix au Moyen-Orient".